lundi 15 juin 2009

Roots Manuva - Slime & Reason (Big Dada - 2008)

Roots Manuva avait tout pour être vénéré comme un demi-dieu du hip hop: un flow impressionnant, grave, charismatique, original et reconnaissable à la première syllabe. Mine de rien, c'est de plus en plus rare. Pour les textes, je déclare forfait: je ne maîtrise pas suffisamment l'anglais et l'argot des faubourgs britanniques pour en saisir la substantifique moelle. Néanmoins, notre homme était aussi son propre producteur. Avec le renfort des blancs-becs de Metronomy et de Toddla T, Roots Manuva se plaçait à la confluence des styles qui agitent encore les nuits londoniennes. Parfois clairement dancehall (Again & Again, Do Nah Bodda Mi, Buff Nuff), volontier electro-pop (le fantastique Let The Spirit), classiquement hip hop (2 Much 2 Soon), Roots Manuva est un peu un traducteur grand public du grime parfois carrèment radical dans lequel s'est englué le hip hop britannique. Malheureusement, deux malheurs se sont abattus sur la tête de Rodney Smith. Pour la première fois depuis l'invention de la drum&bass au début des 90's, un style majeur et pertinent est apparu Outre-Manche, faisant soufflé un vent de rédemption sur une scène electro britannique malmenée par une décennie d'odieux sévices progressive et d'autisme grime: le dubstep. Genre essentiellement instrumental, le dubstep a sacré le règne d'une nouvelle génération de talentueux producteurs, passant par la même occasion à la trappe les MCs. Et comme une malheur ne vient jamais seul, les critiques, importants dans l'émergence de Roots Manuva, ont commencé à regarder avec les yeux de Chimène une bande de craquantes jeunettes (MIA, Thunderheist, Thecocknbullkid, etc.), prêtes à en remontrer au vieux lion avec leurs tenues fluos et leurs hymnes electro pop imparables. Roots Manuva s'est ainsi vite retrouvé dans la peau d'une espèce en voie de disparition, un dinosaure encore vert mais isolé. Juger Slime & Reason dépassé et largué, comme d'aucun ont été tenté de le faire, est cependant allé beaucoup trop vite en besogne. Injustement qualifié de mineur au moment de sortie, largement supérieur à une bonne partie de la production britannique actuelle, ce disque se doit d'être réhabilité à sa juste valeur. Et quand Ebony Bones en sera à son sixième album on pourra comparer les chemins parcourus en connaissance de cause.

Roots Manuva - Let The Spirit

Not very well received when it was first released, Slime & Reason deserves to be rehabilitated. It blends perfectly Roots Manuva original flow with the best electro underground sounds that shake London nights.

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